4 e carnet en Argentine
13 février 2007
À quelques heures de mon retour vers Montréal, je m'arrête un peu pour penser que finalement j'ai peu écrit et peu lu aussi durant ce voyage... Je n'ai visité aucun musée à Buenos Aires, été voir à peine deux films, aucun spectacle.... Je n'ai visité que très peu de sites touristiques... Mais qu'est-ce que j'ai fait durant ces 6 semaines ?
J'ai l'impression de m'être arrêté... pourtant j'ai marché, marché, marché... ces derniers jours dans la capitale argentine j'ai du avoir marché au moins 1000 Km à travers ses quartiers, (c'est mon intégration aux habitants de cette ville qui amène ce soupçon d'exagération) j'ai marché de la Boca avec ses maisons et ses balcons de couleurs jusqu'à San Telmo et son ambiance de Tango. De là, j'ai vu lors de la féria du dimanche avec ses artisans qui étalent tous leurs trésors sur le bitume au rythme d'un air qui commence à m'être de plus en plus connu, des couples en plein milieu de la rue, qui les jambes entrelancées, nous montrent à tous les passants que cette musique ne fait pas que s'écouter mais aussi se danser...
Du centre de cette ville avec ses avenues aussi larges qu'un fleuve (et là j'exagère à peine...) l'architecture des édifices nous rappelant un passé colonial venant de l'Espagne et quelques influences franco-britanniques à l'organisation de ses rues résidentielles comme commerciales qui nous fait faire comme un saut dans la grande pomme New-Yorkaise.
L'animation des quartiers autour de cette gigantesque avenue du 9 de Julio qui sépare la ville en deux, d'où à tout moment en tournant un coin de rue, on peut y apercevoir cette forme phallique montant au ciel, qu'est l'Obélisque, se croyant seul sur la terre tenant tête à ce tournoiement d'autos empruntant l'une des 18 voies qui l'enferment comme dans une prison...
Du flanage dans les librairies de Corrientes au lèche vitrine de Santa Fe, la frénésie de cette ville n'a pas d'égal... ou peut être si... mais dans des mégapoles de la trempe de Paris ou New-York... et là je n'exagère pas...
Oufs... enfin un petit havre de paix que sont les parcs des quartiers de Palermo et de Recoletta... Le cimetierre où reposent les grands du monde argentin dont l'inévitable et innoubliable Évita Perron qui toujours comme un mythe, continue d'être présente dans les coeurs des argentins même plus de 50 ans après sa mort...
J'en ai vu quelques grands dans les boutiques ou les stands de journaux de coins de rue, sur des cartes postales ou des posters, que ce soit le CHE dont cette terre à vu naître comme Astor Piazzolla et Carlos Gardel (ces grands du Tango)... Mafalda et d'autres encore... mais la grande vedette, est sans conteste la PARILLA ET LE VIN ROUGE... La viande (surtout de boeuf) est à l'Argentine ce que la baguette et le bérêt est à la France...
Voilà pour ce tour d'horizon de ce coin de pays de l'hémisphère sud...
LA BOLIVIE DE MIRIAM ET CHAVIN
Ce retour à la fin de ce voyage dans la capitale argentine est venu contraster (les voyages sont souvent fait de contrastes... sinon il faut parfois les provoquer) mon épisode bolivienne qui était totalement innatendue il y a deux semaines à peine...
Des images très fortes me resteront de cette aventure que je me suis donné le droit de vivre malgré qu'elle me semblait une certaine folie... une folie pas tant au niveau du fric dépensé pour prendre l'avion de la Patagonie argentine jusqu'au nord du Chili pour revenir à Buenos Aires afin de terminer le périple, mais bien au niveau d'une liberté à se permettre pour répondre à ses instincts d'aventuriers...
Me voici sortant du bus pour traverser la frontière Chili-Bolivie ce samedi il y a dix jours, avec un rythme de tortue pour se rendre au poste des douaniers afin que mon coeur à plus de 4200 M d'altitude tienne le coup... Je suis comme sur un nuage... sensation bizzarre, je m'allonge le bras sur un stand d'un petit commerçant pour prendre un thé de coca espérant que cette boisson réussira à me garder debout, les deux pieds sur terre... après une longue file pour recevoir la fameuse étampe dans le passeport, nous retournons tous, dans le bus pour continuer notre chemin sur la terre des Aymaras et d'Evo Morales... La basse pression dû à l'altitude me fait fermer les yeux quittant ainsi la splendide vue du volcan enneigé de Sajama et de vicugnas (petits cousins des lamas et des alpacas qui vivent à l'état plutôt sauvage) ...
Je me réveille en sursaut et j'aperçois à l'horizon sur la route une pancarte et un embranchement d'une route secondaire... il n'y a pas de doute c'est bien là qui est mon terminus... Nous sommes arrivés à l'intersection pour aller à CURAHUARA DE CARANGAS... le bus lui poursuivra sa route sans moi vers la capitale bolivienne : La Paz !
Je me retrouve en l'espace de deux minutes sur le pavé au milieu de nulle part ou bien peut-être du paradis... à quelques Mètres de moins à peine en altitude que le poste frontalier que nous avions passé une heure avant... Le village se trouvant à 5 Km, je dois prendre une décision d'attendre un mini bus ou une voiture ou bien m'engager à pied à travers l'altiplano bolivien...
Je prend mon pouls, je mesure la chaleur de ce soleil radieux en milieu d'après-midi... (je peux vous dire que l'astre est brûlant à cette altitude...) Je m'engage donc sur cette petite route tranquillement au pas de tortue pour commencer afin de respecter mon rythme cardiaque et mon corp qui a reçu tout un choc en quelques heures passant du niveau de la mer sur le bord du Pacifique à Arica au Chili, à cette hauteur vertigineuse de l'altiplano Andin.
Après deux heures j'arrive dans cette communauté de maisons en Adobe (terre et brindille de foin) demandant pour la maison de mes amis Miriam et Chavin.... des troupeaux de lamas et d'Alpacas cherchant leur nourriture dans les champs ne semblent pas trop se préoccuper de ma présence, mais moi malgré une fatigue dû au mélange du mal d'altitude et de chaleur, j'ouvre grand mes yeux pour admirer ce décor qui s'apparente plus à des aspects lunaires qu'à ce que notre planète m'avait habitué de voir...
Un gentils voisin, m'amène à la maison de mes amis où on se cogne le nez sur une barrière fermée, il m'amène à côté dans une maison qui sert d'auberge et de quincaillerie du village pour attendre mes amis... j'avais été mis au courant que les jours précédant mon arrivée, mes amis seraient dans la capitale et qu'ils devaient revenir que ce samedi en fin d'après midi...
À peine 30 minutes se sont écoulées quand j'ai entendu par la fenêtre ce Chavin avec ce sourire fendu jusqu'aux oreilles venu me chercher pour m'amener à mon amie Miriam... les cris de joies de mon amie et des enfants ont vite retenties au milieu de la rue pour accueillir ce visiteur un peu impromptu... Si j'avais réussi à parler à Chavin au cours de la semaine, Miriam tant qu'à elle n'était pas au courant de mon arrivée... mais quelques indices lui avaient quand même mis la puce à l'oreille à propos de ma venue...
Voilà que commence une aventure de cinq jours mêlée de retrouvailles avec mes amis, de discussions autour de l'organisation communautaire vécue en contexte de coopération internationale, d'intégration de la petite famille dans la communauté de Curahuara de Carangas parmis les indiens Aymaras, et plein de surprises m'attendaient pour ce passage...
Miriam, mon ancienne collègue de travail dans le milieu communautaire de St-Henri et surtout mon amie est venue dans cette communauté avec toute sa petite famlle pour un contrat de deux ans pour le CECI (ONG canadienne)... Elle a donc lâché sa job d'organisatrice communautaire au CLSC de ST-Henri pour vivre, elle et les siens, la vie andine au milieu des indiens aymaras dans un projet sur la santé qui a pour objectif d'améliorer la qualité de vie des habitants et de réduire la mortalité infantile.
Des idées, de la créativité, de l'énergie, voilà comment j'ai retrouvé mon amie et sa famille... en l'espace de huit mois ils se sont intégrés dans une communauté si différente de ce que nous pouvons connaître, dans le plus pur respect du quotidien des habitants espérant que ces derniers leur fassent une place au sein de leur communauté.
Les différences culturelles, mais surtout de confort n'ont pas arrêté la petite famille qui de jour en jour ont multiplié les contacts et les relations pour faciliter leur intégration... Pas seulement Miriam, mais les enfants en intégrant l'école du village et surtout Chavin, qui soit en support à certains projets de Miriam au niveau de la santé ou en développant ses propres projets, a su lui aussi faciliter l'intégration de toute sa famille...
Miriam n'arrête pas, elle me traîne partout, chez le maire, au centre de santé voir le médecin, voilà la sage femme qu'elle me présente en passant dans la rue... on aperçoit au loins des hommes et des femmes qui sont tous de couleurs vêtus, ce sont des autorités originaires de communautés plus éloignées de passage au centre de Curahuara.... Je me rend compte que Miriam est dans son élément.... elle a réussi à faire de la concertation au niveau de la santé dans ce contexte si éloigné du notre au Québec. Réunissant les tenants de la médecine moderne médecin, maire, infirmière avec les adeptes de la médecine traditionnelle, guérisseuse, sage-femme, autorités originaires... Des petits projets se développent dans ce sens une chambre de naissance adjacente au centre de santé va permettre à la sage femme d'accoucher des femmes à proximité d'un médecin en cas de problème et ainsi rapprocher des femmes réticentes à la médecine moderne d'accoucher dans un contexte à la fois naturel et un peu plus sécuritaire... Une brigade de la santé avec des jeunes du village est en vu, ces jeunes qui seraient formés s'en iraient dans les zones rurales les plus éloignées afin d'enseigner et de sensibiliser les communautés à certains aspects d'hygiène pour éviter certaines maladies...
Avec les écoles des communautés éloignées qui n'ont ni électricité ni eau courante, voilà qu'on tente une expérience de collecteur solaire sur le toit de l'école afin d'obtenir de l'eau chaude pour permettre aux enfants de se doucher et de se laver les mains.... Cette iniative en collaboration avec une organisation autrichienne est aussi un test pour Miriam (et Chavin qui est très impliqué dans ce projet) pour voir si les communautés se mobilisent autour de ces projets.
Déjà les professeurs de ces écoles éloignées du centre de Curahuara, rencontrés lors de mon passage indiquent une énergie qui va dans le même sens que le projet...
De passage à Curahuara de Carangas en même temps que moi, des amis Patrice et Annie, se joignent afin que nous allons chercher dans des champs deux petits agneaux qui nous ferons grâce un peu plus tard de leur chair...
Chavin ayant appris depuis peu à saigner l'animal nous installe "un ÉTAL de boucher" pour l'occasion dans l'arrière cour... Pat et moi tenons les pattes alors que Chavin avec son couteau un peu mal aiguisé tente de faire souffrir l'animal le moins possible... un des petits agneau servira à la fête improvisée pour le départ du médecin qui a passé plus de 4 ans dans la communauté...
Le soir venu, nous nous rendons au centre de santé pour cette fête avec nos morceau de viandes cuit au four à bois afin de se réunir avec les acteurs locaux de la communauté...
Pour ce qui est du mal d'altitude malgré une certaine fatigue présente, de jour en jour s'atténue avec l'aide des feuilles de coca que je mâche, mais voilà que mon passage s'achéve.
Miriam qui n'est pas arrêtable, nous raconte chaque soir, plein d'anectotes qui se sont passées au cours de leurs premiers mois dans leur nouveau chez soi... On se raconte des nouvellles du Québec... racontant la dégringolade de Boisclair ou encore des Accomodements raisonnables... ayant travaillés tous les deux dans le milieu de l'immigration ... ce sont des sujets qui nous interpellent...
Chavin a quitté pour La Paz pour rejoindre les autrichiens qui viendront passer quelques jours dans la communauté pour installer et donner la formation sur le collecteur solaire... (à des personnes de la communauté mobilisées par Miriam et qui deviendront- espérons le - des agents multiplicateurs). Il est passé par le terminus m'acheter un billet de bus La Paz- Arica(Chili)... afin que je puisse reprendre au croisement des routes de Curahuara le même transport qui me ramènera après 5 jours de stage en organisation communautaire, vers le Chili et le Pacifique...
C'est dans ces petites expériences que nous réalisons que nous sommes en vie et qu'il vaut mieux en profiter pour réaliser des souhaits qui nous sont chers...
Bonne fin de journée
Je vous embrasse
Richard